Gerberoy l’authentique

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Il faisait bien froid ce matin là et le ciel encore couleur d’acier pesait glacialement sur Gerberoy. J’empoignai mon appareil photo, en songeant combien ce petit village du pays de Bray m’était apparu chaleureux au printemps, avec ses ruelles gorgées de fleurs qui s’accordaient si bien avec les vieilles maisons d’inspiration normande. Convaincu que la matinée allait être rude, j’enfilai trois polaires les unes sur les autres et mon vieux bonnet vint recouvrir mon crâne déjà partiellement figé.

Gerberoy est un magnifique petit village tout proche de Beauvais et à quatre-vingt kilomètres au nord ouest de Paris. Une rue principale, traversant le village, dessert des ruelles pavées, bordées de vieilles maisons de bois et de torchis, qui semblent ne pas avoir changé depuis le 17 ème siècle. Il faut dire que la petite cité, qui conserve quelques vestiges de remparts, a vécu maints tourments historiques dont ceux de la guerre de cent ans. Tout est silence ce matin. Pas de cris d’enfants joyeux à l’heure de l’école. Beaucoup de maisons aux volets fermés semblent endormies pour l’hiver. C’est aussi l’un des plus petits villages de France avec moins de cent habitants, une démographie en baisse et une population relativement âgée. Pourtant, la place connaît bien des temps forts grâce à de nombreuses animations. C’est un peu comme un cœur qui vit au rythme de ses battements. Temps forts et temps de repos. Bien des manifestations, bien des animations sont programmés toute l’année.
le-sidaner-01L’événement le plus important qui attire sans doute le plus de monde est la Fête des Roses. Une fois par an, (le troisième week-end de juin), Gerberoy fête son emblème. La journée est dédiée à la rose et chacun peut déambuler dans les ruelles comme dans un immense jardin embaumé. Roses et hortensias s’étalent à foison et exhalent leur subtil parfum pour le plus grand plaisir visuel et olfactif des amateurs. Et c’est bien grâce à un peintre que cette tradition perdure depuis  1928. À l’instar d’un certain Claude Monet, Henri Le Sidaner cherche une maison à la campagne pour y produire une peinture toute intimiste. Il se fixe à Gerberoy dans l’ancienne maison des religieuses. Il transforme le verger en jardin qu’il ne cessera d’agrémenter, construit sont atelier d’artiste, crée une roseraie…et s’implique au plus près dans la vie des villageois, les incitant à planter fleurs et arbres, allant jusqu’à les conseiller pour les couleurs des façades de leurs maisons. Il crée en 1909 la société des amis de Gerberoy qui devient l’une des premières associations de sauvegarde du patrimoine en France. Cet embellissement du village est un héritage qui se perpétue encore aujourd’hui.
le-sidaner-04Pour l’heure, le village aux ruelles glacées et venteuses est désert. Je passerai deux heures solitaire, déambulant  parmi les rosiers transis et les hortensias fanés. Village endormi, village figé, je voulais des images absentes de toute vie, de tout signe de vie moderne. J’ai bien entraperçu ici ou là quelque antenne de télévision, et aussi quelque engin à quatre roues…mais j’ai pu pendant quelque temps m’imaginer avoir fait un retour vers le passé. En quittant Gerberoy et son silence, la vie m’apparut sous la forme d’un petit troupeau de moutons qui vint vers moi et après quelques familiarités, chacun s’en fût de son côté du grillage.

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