À l’origine, j’avais l’intention de rendre une petite visite au Musée d’Orsay, sans doute mon musée préféré, autant par son contenu que par son architecture que je trouve particulièrement réussie pour une sympathique déambulation. Orsay a toujours évoqué pour moi le plaisir de flâner d’une salle à l’autre au milieu de peintures qui font plus partie de mon intimité que les magistrales œuvres du Louvre. Une exposition consacrée aux dessins de danse de Degas me faisait un clin d’œil depuis quelque temps à Orsay. Et puis, influence du climat ou inconséquence de l’esprit humain, c’est vers le petit Palais que j’ai orienté mon choix compte tenu d’une affiche alléchante “L’art du pastel de Degas à Redon”. Finalement des dessins de Degas aux pastels du même Degas, il n’y avait pas forfaiture à se désavouer. 
Il fallait ce jour là une bonne dose de courage mais surtout d’épais vêtements pour démarrer une file d’attente au pied des marches du petit Palais. L’air y gelait même la lumière et le vent sibérien sans pitié ne laissait aucun répit aux pauvres SDF emballés tels des momies dans leurs duvets poussiéreux.
Après 20 minutes d’attente et quelques rigolades entre les visiteurs que nous sommes (le rire doit certainement tenir chaud), deux fonctionnaires ouvrent enfin la file d’attente. C’est là, que nous apprenons que l’entrée se fait à un autre endroit du bâtiment. Tout le monde râle ! Une anglaise nous confie :
“— Je ne comprends pas en France c’est toujours le bazard !”.
Résignés, mais finalement trop contents de nous mettre au chaud, en petit troupeau docile nous contournons la majestueuse entrée principale aux ferronneries dorées pour nous agglutiner devant une vilaine petite porte vitrée qui….ne s’ouvre pas ! Là derrière, quelques “ombres” s’agitent, vont et viennent dans une effervescence fébrile qui n’annonce rien de bon. Mon impatience grandit et je sens la bonne humeur de mes compagnons d’infortune tourner au vinaigre. Une baie vitrée s’ouvre, on se précipite, un groupe force le passage. Trop tard pour nous, la porte se referme brutalement. Ce n’est pas la bonne entrée. Après plusieurs tentatives, comme la mer rouge s’écartant pour laisser passer les israélites…l’accès au musée nous est enfin largement offert. “Comme vous avez pu le constater, nous avons un problème d’ouverture des portes !” Les railleurs en profitent pour demander au personnel du musée s’ils ont eu le temps de nous préparer le café et les croissants…Je vous rassure, le reste de la visite se fera dans une ambiance calme et feutrée, très intime pour cette belle exposition de pastels.
“Le pastel a une fleur, un velouté, comme une liberté de délicatesse et d’une grâce mouvante que ni l’aquarelle, ni l’huile ne pourraient atteindre.”
Joris-Karl Huysmans (Exposition des Indépendants en 1881)
L’âge d’or du pastel connaît son apogée en 1765. Il est à ce point prisé, qu’il rivalise largement avec la peinture, la sculpture et la gravure. Pour les portraits, il est même préféré à l’huile. Les grands pastellistes de l’époque se nomment Charles Le Brun, Joseph Vivien, Maurice Quentin de La Tour, Jean-Baptiste Chardin…
Au 18 ème siècle le pastel atteint la perfection, toute l’aristocratie se fait portraiturer par les meilleurs pastellistes. La révolution Française apporte un bouleversement en profondeur de la société. L’aristocratie est désormais suspecte et le pastel, reconnu pour être le mode de représentation favori de la bourgeoisie est jugé compromettant. Tout ce qui persiste de l’ancien régime devient antisocial. Perruques, vêtements amples et enrubannés, fards…tous les symboles d’une classe sociale déchue, dont la technique du pastel avait su si bien rendre les attraits, sont bannis. Le pastel devient démodé autant que les codes vestimentaires et esthétiques de la bourgeoisie. C’est le retour à la rigueur avec la peinture à l’huile.
Dans le dernier quart du 19 ème siècle, puis au début du 20 ème siècle, le pastel jouit d’un véritable intérêt et offre une alternative “nouvelle” à la peinture à l’huile. La création de la Société de Pastellistes Français en 1885, la construction d’un pavillon de pastellistes pour l’Exposition Universelle de 1889, permettent à cette technique “redécouverte” de s’imposer pour elle-même.
Auprès des Impressionnistes, le pastel se développe comme une évidence pour traduire des sensations instantanées. Sa facilité de mise en œuvre sur le terrain, sa rapidité d’exécution en fait un médium en harmonie avec leur esthétique, suggestion de mouvement, effets de lumière. Artistes paysagistes avant tout, les impressionnistes n’en délaissent pas pour autant la représentation humaine pourvu qu’elle soit rendue dans la vérité du quotidien. Degas avec les danseuses, Mary Cassatt avec les figures d’enfants, témoignent de cet intérêt.
La fin du 19 ème siècle signe le retour des grands portraits mondains. L’élite aristocratique et bourgeoise, retrouve le charme et le raffinement de la poudre de pastel. Cette époque bénie pour les artistes leur permet d’exprimer pleinement art et virtuosité et leur offre aussi de très bonnes perspectives commerciales. Hommes influents, élégance féminine en grands formats témoignent que le pastel n’a plus rien à envier à la peinture à l’huile. Les carnations sont admirablement rendues et les nus de Pierre Carrier-Belleuse ou d’Alfred Roll démontre la grande variété d’expression des pastellistes de cette époque.
Les peintres “symbolistes” trouvent dans le pastel la magie qui leur permet d’exprimer toute leur réalité intérieure. Sentiments, rêves, ils privilégient les sujets rares, littéraires, allégories ou mythes. C’est tout un univers poétique qui prend forme bien loin de l’univers réaliste et instantané des impressionnistes. Le monde étrange et fanstasmagorique d’Odilon Redon conclut cette exposition à travers 3 pastels, dont le sentiment subjectif qui est l’essence même de son œuvre reste encore aujourd’hui une énigme.

































































C’est en 1877, alors qu’il expose depuis plusieurs années déjà au salon des impressionnistes, qu’il réalise son célèbre tableau “Le Bal du moulin de la Galette”. Après une période de pauvreté, il revient petit à petit vers le portrait et connaît un immense succès en réalisant le “Déjeuner des canotiers”. En 1890, trois ans après les “Grandes Baigneuses”, il épouse Aline Charigot. Il est atteint pour la première fois, en 1898, de rhumatismes aigus, maladie qui sera le calvaire de la fin de sa vie. De 1905 à 1909, sa maladie s’aggrave et il décide de se fixer définitivement dans le Midi. Il poursuit inlassablement son travail, ne pouvant plus peindre qu’en faisant attacher les pinceaux à ses poignets. Il meurt en 1919, reconnu et comblé. Il est le père de cinq enfants, dont Jean Renoir, célèbre réalisateur et scénariste français.
Considéré comme l’une des sources du mouvement expressionniste, on ne peut saisir la violence d’expression de l’art de Toulouse-Lautrec sans tenir compte de sa vie, entièrement commandée par son infirmité.

Un voyage au Maroc lui révèle l’Orient en 1832. dans ses œuvres de jeunesse, la composition tourbillonnante qui traverse le tableau n’obéit à d’autre loi que celle de la vie, et l’intensité dramatique ne recule pas devant l’outrance des moyens. À l’âge mûr cependant il tend à intégrer l’expressionnisme romantique dans l’art réglé des classiques. Ces tendances l’amènent à demander des inspirations à la culture antique dans ses grandes décorations des Bibliothèques du Sénat, de la Chambre des députés et du Louvre. La chapelle des Saints-Anges, peinte à Saint-Sulpice est son testament artistique et philosophique.















Et si c’était à refaire… je referais pareil à cette nuance près que je me lâcherais davantage. C’est vrai, en vieillissant, on se rend compte de tout ce vécu que l’on a accumulé. Et c’est si difficile d’en profiter, de le faire ressortir. Oui ! C’est ça, se lâcher ! J’aimerai aller plus loin en peinture, tenter plus. Mais ça demande un effort énorme. Sortir de ses habitudes c’est si important. Je ne veux pas me contenter de refaire ce que j’ai déjà fait et que je réussis “que je suis sûre de réussir” à tout coup. Parfois j’ai des amis qui me disent à propos d’un détail sur mes peintures, “tiens, ça c’est bien, tu devrais refaire comme ça !”. Mais, ça ne m’intéresse pas de capitaliser sur ce que j’ai déjà fait et qui est réussi. C’est si facile de s’enfermer dans un systématisme. J’ai envie d’aller au delà, de profiter même de certaines erreurs pour prendre des chemins que je n’ai pas explorés. Si j’étais maître du monde… ce que je ferais ? Franchement, je ne sais pas. Je n’ai pas de réponse ! Il faudrait éduquer les gens, pour qu’ils apprennent à se connaitre, …que les enfants puissent donner vie à l’art qu’ils portent déjà en eux car après l’école maternelle ils doivent l’étouffer.