L’incertain

La photo d’art, d’actualité, de voyage, d’édition de toute nature, la photo documentaire…est la plupart du temps identifiée par le nom d’un auteur. Dans ces images on peut reconnaitre la signature de Steve McCurry de Sebastio Salgado, de David LaChapelle, de Martin Parr, de Diane Arbus ; et de nombreux autres artistes sans doute moins connus mais dont le style ou l’implication pour une cause, un thème, nous touchent plus particulièrement.
Tous ces photographes sont surtout des professionnels, des artistes amoureux, de l’image. Ils l’ont chevillée au corps et leur capacité à rendre visible le monde à travers leur objectif de manière si personnelle, nous émerveille ou nous surprend à chaque fois.

Mais au delà de la ”grande photo”, j’ai toujours été sensible à la ”petite photo”du quotidien, à celle qui capte avant ou après, un évènement familial, une réunion amicale, et l’heureux déjeuner sur l’herbe par une belle journée de printemps. C’est là que le tonton rigolo apparait, que le ”petit” que l’on place au premier rang et à qui on demande de ne pas faire le guignol, grimace faute d’avoir le soleil dans les yeux.
On possède tous au fond d’un tiroir ou dans une malle au grenier les fameuses photos de ”la” famille. Sagement collées dans un album ou en vrac dans une boite à chaussure. Elles émergent de temps en temps comme un corps refait surface. Un brin de souvenir pourrait t’il apaiser momentanément une plaie existentielle ?

En tout cas, à la vue de toutes ces photos si disparates tant par leur format, leur qualité, leur origine ou leur datation…je me suis toujours demandé qui pouvait être derrière l’objectif. En fait, il y a très souvent une absence et c’est le photographe lui-même. Ce fantôme qui apparait parfois discrètement en ombre juste là, couché au pied des personnages. Qui est-ce ? Dans la plupart des cas on ne le sait pas. Bien sûr, il existe quelques pointilleux qui me diront que le retardateur existait et qu’il était possible de s’immortaliser. Faites moi voir ça sur un Brownie Kodak !
Sur chaque photo, il est amusant de rechercher l’auteur du cliché. Par le style de la mise en scène ou précisément par son absence. Reviennent en mémoire la personnalité des uns et des autres, leurs habitudes lors des séances de pose. Car la plupart des clichés familiaux sont des tableaux posés, composés souvent avec exactitude. C’est un rite ou le degré de parenté et l’âge déterminent aussi le rang de visibilité. La hiérarchie d’un certain ordre moral, de la reconnaissance des liens unissant des parents, une fratrie, de la place des amis au sein d’une famille.

Aujourd’hui, des millions de selfies sont réalisés chaque minute dans le monde entier. On n’aura jamais eu autant d’individus photographiés, identifiés par leur portrait depuis une décennie. Cela compense t’il mon questionnement sur ce ”photographe anonyme” que j’ai tenté de découvrir et qui ne fait que fuir . Entre silence et ombre, ”Inconnu”, sous quelle apparence pourrais tu te révéler ?

7 réflexions sur « L’incertain »

  1. AIMER les gens les peindre , les photographier leur parler . superbe Série Serge !!!

  2. Quelles belles réalisations ! Une si bonne idée ces toiles ! Toutes fraîches et réalistes. Toujours si admirative de vos travaux. A vous suivre … Encore.

  3. Quelle belle idée de donner, avec ton extraordinaire talent, une seconde vie à ces photos d’antant. Ce sont, oui des moments du quotidien arrêtés pour la photo et que nous avons la chance de pouvoir encore trouver dans un tirroir, une boîte ou un album. Et certains de ces instants figés sont chers à nos coeur, comme ici, au tien. Les selfies et autres photos prises sur smartphone offrent une l’immédiateté et fiabilité interessantes. Mais ils se perdent un peu dans la foison d’images transférées sur un ordinateur que l’on ne regarde presque plus ensuite. D’ailleurs, l’argentique, le bon vieux polaroïd relooké, a depuis quelques années le vent en poupe. Histoire de recréer la “magie”. Bravo.

  4. Le photographe anonyme a été bien prolixe …
    Il Arrive du temps jadis , d’ avant ces selfies nombrilistes dont le seul but , souvent , est de briller sur Instagram . Instagram, l’instant , l’étincelle fugitive du présent . Le but n’est plus d’étoffer , de fixer les précieux souvenirs de famille ,mais d’épater une infinie communauté de pacotille .
    Plus de photos ? Alors des portraits peints … qui se cache derrière le pinceau de l’artiste … ?
    Très réussie cette série !

  5. Quelle production ! C’est vrai qu’avec les selfies çà va plus vite mais il y a moins magie. En tout cas on passe un bon moment à admirer ces magnifiques portraits où l’on peut reconnaître certains….

  6. Toutes ces peintures déroulent des scènes de vies, souvent non apprétées, au naturel, ou au contraire tirées de photos destinées à figurer dans les albums pour “marquer” une époque, un évènement…..ces photos on les conservait religieusement, justement parcequ’elles étaient rares, un peu solennelles, figées même parfois….c’est tout cela qui passe dans ces peintures et c’est très touchant (évidemment très bien réalisées…).

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