Les orchidées et Théophraste.

Aujourd’hui en préambule, je dois vous dire deux mots sur Théophraste. Oui, le philosophe Grec celui-là même. Il fut le fondateur de la botanique en tant qu’étude des plantes et considéré comme un grand naturaliste. C’est à Théophraste que l’on attribue la dénomination suivante : “Orchidée, du grec orchis, qui signifie testicule, en référence à la forme des tubercules souterrains de certaines orchidées terrestres des régions tempérées”.
Si je dois vous parler maintenant de ma femme, ce n’est pas par rapport à la définition de Théophraste (je pense qu’elle ne connait pas cette définition)…mais tout simplement parce que ma femme adore les orchidées et que chez moi, il n’y a que ça. Il devenait donc évident que ces fleurs avaient tout pour servir tôt ou tard de sujet de dessin.

Pas facile de travailler sur des orchidées blanches sur un fond blanc. Soit on reste très clair et on ne voit rien, soit on force trop les valeurs et on aboutit à des morceaux de charbons accrochés à des tiges.
Le dessin exact, voire documentaire de l’orchidée n’est pas ma priorité. Je laisse aux artistes botanistes toute latitude pour nous épater par la précision de leur travail. C’est surtout le rythme et l’enchaînement d’une succession de valeurs qui m’ont le plus intéressé. C’est l’exercice que je me suis imposé ici. Le rendu au fusain sur papier, me fait penser à l’aspect de la peinture sur de la porcelaine. C’est une ambiance douce et légère, la valeur du gris s’évaporant progressivement dans le fond blanc.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’essai au pinceau et encre de chine (ci-dessous) donne un dessin plus noir, plus fort, plus contrasté. Le papier en ma possession n’étant pas bien adapté à cette technique du lavis, j’ai eu du mal à trouver la bonne gestuelle. Trop lisse et trop absorbant, ce papier sèche très vite et ne permet aucun travail dans l’humide. Le coup de pinceau et la densité du mélange encre/eau doivent être parfaits du premier coup…aucune reprise, aucun repentir ne sont possibles sitôt la touche posée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sans rapport avec les orchidées “testiculaires” (bien que…) me revoilà avec mes dessins de nus. Dans le cas présent, au lieu de coloriser mes croquis au fusain, j’ai attaqué  le dessin directement à l’aquarelle afin de ne pas avoir le tracé noir en sous-couche. J’ai fortement détrempé à l’éponge le papier au R° et au V°. Posé sur une planche, que j’ai peinte d’une couche de peinture acrylique, le papier bien mouillé conserve très longtemps son humidité. Dans le très humide, j’ai tracé un vague contour de la forme qui s’est très rapidement dilué. C’est ce qui crée cette sorte d’irisation. Sur un papier moins humide, je suis revenu peu à peu pour préciser le tracé. J’ai posé également les principales masses indiquant les ombres qui créent le relief. Le visage, les cheveux et quelques points forts ont été placés aussi sur le papier sec.

Adam et Ève.

Depuis quelques temps, je me suis remis au croquis de nus.  Le jeudi matin c’est une session libre ou les progrès se font en se “dépatouillant” entre amis assidus. Une fois par mois, le samedi avec Élisabeth Ribera (c’est notre intervenante, bien-sûr vous ne la connaissez pas! Mais je dois rendre compte de l’énergie qu’elle dépense pour bousculer nos habitudes), notre petit groupe se retrouve dans l’effervescence de l’atelier. J’aime cette ambiance intense et cependant décontractée ou l’on entend le fusain caresser, s’effriter ou craquer parfois brusquement sur le grain prononcé du papier Ingres.

Le croquis par essence doit être réalisé dans un temps relativement court. Les poses du modèle ne dépassant jamais 20 minutes pour les poses les plus longues et 5 minutes, voire quelques secondes pour les poses les plus courtes. Il arrive parfois que le temps de choisir son fusain ou de tailler son crayon gras, le “ding” du minuteur retentit indiquant le changement de pose. Le croquis restant inachevé, j’ai toujours l’impression d’être passé à côté du chef d’œuvre de la matinée. On peut toujours rêver!

L’idée m’est venue de mettre un peu de couleur sur certains croquis. Je vous livre mes différentes expériences et mes conclusions en quelques mots.

De l’eau qui mouille trop.
La colorisation est faite ci-dessus directement à l’aquarelle sur le croquis original. La difficulté de poser l’aquarelle sur le dessin, est que toute technique humide dilue le fusain ou la craie noire. Il faut donc faire vite et ne pas trop revenir sur les zones mouillées. Cet inconvénient est minoré dès lors que l’on fixe suffisamment le croquis. Et encore…..

La main lourde de l’éléphant.

Ici, je montre l’état de 2 originaux. Le croquis original fait sur place et la reprise au fusainde ce même croquis avec l’ajout d’aquarelle. En fait la reprise d’un croquis n’est jamais idéale. Sur la dynamique du trait, de la spontanéité du geste, j’ai beaucoup perdu. De plus, sur le plan de la colorisation, l’aquarelle rehaussée de gouache blanche a alourdit l’ensemble. Un croquis doit rester un croquis ou alors, il faut aller plus loin, vers un travail plus précis, plus proche d’un dessin académique, d’une étude des lumières et des ombres.

De l’illusion avec Painter.
Sur ce portrait rapidement croqué, j’ai appliqué une autre technique de colorisation. Après la reproduction numérique du dessin, je l’ai importé et travaillé dans Painter (célèbre logiciel de peinture virtuelle). Nous sommes loin de la sensualité du papier, de la gestuelle ample de la main dans l’espace. Mais je dois dire que l’effet est tout à fait “bluffant”. D’ailleurs beaucoup d’artistes (illustrateurs principalement) utilisent ce logiciel pour leurs travaux.

Pour le plaisir de la découverte je suis allé plus loin avec quelques essais réalisés dans Painter. Qui n’essaie pas n’aboutit à rien.

Sur le détail ci-dessus, on peut voir que la “couleur virtuelle” se fond bien avec le croquis original tout en générant des nuances très subtiles.