Vieilles tôles

Il ne fait pas bon se promener sur les plages Landaises cette nuit du 2 au 3 décembre 1976. La tempête sur l’océan fait rage. À l’intérieur des terres, les pins craquent et se couchent sans combattre, entièrement soumis aux vents déments venus du large. Deux navires (le cargo à vapeur Virgo, le pétrolier Apolonian Wave) s’échouent l’un à côté de l’autre sur les plages de Mimizan.

L’Apolonian Wave brisé en deux sur les plages landaises.

L’Apolonian Wave comme un sous-marin surgi de la mer.

Parti de Bayonne en direction du Portugal, le Virgo, cargo de 109 mètres battant pavillon Grec est en vilaine posture au large de Bilbao. Le capitaine met cap au nord pour fuir la tempête.
Dans des creux de 14 mètres, au large de Mimizan le Virgo est à la dérive et vient s’échouer sur la plage de Lespecier à quelques kilomètres de la petite ville balnéaire.
Grâce à l’organisation rapide des secours, le naufrage ne fera aucune victime. L’équipage quitte le navire au petit matin.
Accessible à marée basse, la cargaison du navire attire vite les convoitises. Quelques téméraires, renouant avec l’instinct de piratage de leurs ancêtres, se hissent à bord et s’emparent de quelques marchandises. Le compas du Virgo fait partie des pièces dérobées.
Le Virgo est démantelé sur place dès avril 1977. Les tronçons d’acier découpés sont expédiés en Galice pour la récupération. Un violent incendie en juillet ravage les restes de l’épave. Le vieux cargo est entièrement démonté à la fin de l’été 1977, les fonds du navire disparaissant avec le temps sous les sables.
L’Apolonian Wave est un pétrolier grec de 207 mètres en fin de vie. Il se dirige vers les chantiers de démolition Espagnols avec le minimum de carburant pour arriver à destination. C’est sans compter sur la tempête qui l’oblige à consommer plus de combustible que d’habitude. C’est la panne de machines. Le pétrolier est en perdition. L’équipage est hélitreuillé dans la journée du 2 décembre. Le navire dérive sans équipage, entrainé par les courants et finit par s’échouer lui aussi sur la plage de Mimizan à 700 mètres du Virgo.

Il était possible d’atteindre le navire à marée basse.

Après de longs mois de discussions et d’hésitations, une tentative de remise à l’océan de l’épave échoue et brise le navire en 2 parties. C’est fini pour l’Apolonian Wave, il ne quittera plus la plage et est lui aussi soumis au chalumeau pour être démoli in situ.
Des parties du Virgo resteront de nombreuses années sur le sable blanc de la plage, se consumant lentement au gré des marées, des vents salins, et des intempéries.

Les restes du Virgo hantent la plage

Les vieilles tôles, source d’inspiration pour les photographes.

J’ai retrouvé et scanné quelques diapositives que j’avais réalisées à l’époque de l’Apolonian Wave déjà brisé en deux. J’ai eu l’occasion de visiter plusieurs années de suite ce site et de saisir la lente agonie d’une partie de la structure abandonnée sur la plage. Ce sont ces histoires et ces documents qui m’ont inspiré pour réaliser les deux toiles ci-dessous qui forment un diptyque.

(Aux même dates, le Rubben, cargo panaméen est lui aussi en perdition et finit par s’échouer sur les plages Landaises à Seignosse, 60 km plus au sud.)

7 réflexions sur « Vieilles tôles »

  1. Merci pour l’intérêt que tu portes à cet article de mon blog. Je ne pourrai pas, hélas, te montrer d’autres photos des restes de L’Appolonian Wave car ce sont des photos réalisées à l’époque en argentique (film positif/diapositives). Il m’a fallu les scanner spécialement pour les passer en numérique. Et, à l’heure actuelle, je n’ai plus de scanner pour réaliser cette opération sur d’autres diapos.

  2. Bonjour,

    les deux dernières photos sont des restes du Virgo et non de l’Apollonian Wave. On peut voir apparaitre les restes bien dégagés de chacun des navires après les grandes marées. J’ai quelques photos des restes du pétrolier faites cet été. On y distingue bien la partie avant et l’arrière dont on voit le reste des machines.

    @+

  3. Si il n’ y avait pas un minimum de règles pour protéger nos côtes , je n’ ose imaginer dans quel état serait nos bord de mer ;(
    Un reportage qui fait réfléchir , très bien illustré par Serge , merci !

  4. bonsoir

    excellent reportage !

    ça doit être impressionnant à voir et tes photos rendent bien l’aspect gigantesques des navires …

    superbe tes 2 peintures , elles étaient à l’expo d’ailleurs ;o)

    A+

  5. Un texte interessant accompagné de photos sombres qui montre la force de la nature contre ces bateaux d’acier.
    Tes deux peintures sont magnifiques, quelles couleurs !

    Bref, un très “bel” aricle.

  6. Compliments Serge !
    Tes deux toiles me plaisent beaucoup , teintes rouillées , métal porteur de vieilles histoires , on entendrait presque le vent du large au travers !

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