Fontaine de Vaucluse

Fontaine de Vaucluse est une petite commune non loin d’Avignon, assez calme pour ne pas dire relativement triste en dehors de la période estivale. Il n’y a pas grand chose à y faire. Et les quelques ruelles et vieilles maisons du village, ne valent pas une petite étoile dans un guide touristique. Suite aux deux ou trois visites que j’ai pu y faire il ne m’est à aucun moment venu l’idée d’y séjourner au-delà de quelques heures.

Non, ce qui suscite l’intérêt ici, c’est son gouffre impressionnant au pied d’une falaise de 240 mètres de haut, au creux d’une vallée close appelée “Villa Clausa” en latin qui donna son nom en 1793 au département du Vaucluse. C’est au fond de cette vallée étroite et cadenassée que jaillit la source de la Sorgue. Elle est la plus puissante “exurgence” de France et la cinquième au monde avec un écoulement total de 630 millions de m3 par an.

La source de la Sorgue est le produit monstrueux d’un immense réseau souterrain. Les eaux jaillissantes proviennent de l’infiltration des eaux de pluie et de la fonte des neiges du Mont Ventoux, des Monts de Vaucluse, du plateau d’Albion et de la Montagne de Lure.
Le gouffre quant à lui, est un siphon qui descend très loin dans les entrailles de la Terre. Il a été exploré pour la première fois en 1878, par un scaphandrier marseillais, Mr Ottonello, qui atteint -23m de profondeur dans son scaphandre lourd. L’équipe du commandant Cousteau aussi se mesurera au gouffre en 1946 : première plongée en scaphandre autonome, il atteint -46m de profondeur. L’exploration la plus profonde à ce jour est celle de 1985 avec -308m de profondeur grâce à un sous-marin téléguidé. On ignore toujours aujourd’hui ce qui existe au delà de cette profondeur.

Entre 2001 et 2003, sous couvert de prospections archéologiques, la Société Spéléologique de Fontaine de Vaucluse explore la cavité avec le Spélénaute de -40 à -80 mètres. Ces plongées livrent à la découverte 400 pièces antiques et près de 1600 pièces datées pour les plus anciennes de -80 ans avant JC et fin du 5ème siècle pour les plus récentes. Cela atteste de la fréquentation du site depuis l’Antiquité et confirme que la source recevait des offrandes lors du culte de l’eau cher aux Romains.
En plein été, la visite de l’exurgence est profondément décevante. Après une petite marche en montée le long de la rivière ombragée (bordée de boutiques souvenirs et accompagnée d’odeurs de friture), on arrive devant un grand trou, un genre de caverne où stagne plusieurs mètres plus bas, une eau sombre, pas très propre.
Tout autour, un monde minéral, des arbres morts aux racines incrustées dans la pierre offre un spectacle d’un autre monde. On pourrait s’attendre à voir surgir de ce trou, identifié comme un anus de la terre, un monstre noir et visqueux qui emporterait en ses profondeurs tous les petits touristes aux tee-shirts bariolés que nous sommes. Et voilà, on reste là, un peu songeurs, sans savoir quoi faire. Mais, où est t’elle l’eau turquoise des photos, le lagon bleu des mers du sud ? Elle coule où cette source tant fantasmée ? Ma foi, si l’envie vous prend de connaître la force démesurée de la cinquième source au monde, il vous faudra revenir au printemps lorsque la Sorgue surgit souveraine et surpuissante, débordant de sa vasque en cascade blanche sur les rochers.

En ces mois de sécheresse, la visite du moulin à papier, en bord de rivière ne vous consolera pas du gouffre à sec. Vous y verrez sous les yeux étonnés des touristes, quelques roues en mouvement, mues par un maigre filet d’eau. Pour le reste aucune visite n’est programmée, aucune explication ne vous sera donnée. Une balustrade en surplomb de l’atelier vous conduit directement à la boutique de la papèterie où les prix prohibitifs, ne vous inciterons pas à rapporter à la famille (ou à un aimable voisin, celui qui garde votre adorable chien), un petit souvenir. En revenant vers le centre du village, une galerie dont la plupart des artisans ont déserté les boutiques ne retiendra pas non plus très longtemps votre attention. Finalement, le gouffre de la Sorgue, vous aura provoqué comme un petit creux (sans jeu de mot) et le bon réflexe avant de quitter Fontaine de Vaucluse sera de vous installer à un bar panoramique, un verre à la main tout en contemplant la Sorgue passer silencieusement.

La Sorgue en crue (Novembre 2011)
Une vidéo YouTube.

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10 réflexions sur « Fontaine de Vaucluse »

  1. …le problème, c’est de récupérer nos richesses ensuite. Sil faut attendre la sécheresse totale, on a encore du temps 😉

  2. oui, il faut tomber au bon moment. Ce sont les caprices de la nature. Mais…tout de même je constate que le niveau est de plus en plus bas…

  3. Encore une belle leçon que tu nous donnes ici ! Mais le ton sarcastique de l’article découragerait la plupart d’entre nous. En fait tu as fait le travail à notre place.
    Alors, merci.

  4. Nous, on vient de faire simulation de visite, grâce à toi avec comme à chaque fois ta littérature passionnante !

  5. Finalement le gouffre est un excellent coffre fort, on devrait tous y mettre nos économies, les richesses ont l’air de bien s’y conserver…..

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